dimanche 22 août 2010
Elle s'auto-dégoutait pourtant, elle continuait.
Elle demeurait là, impassible, le cœur retournée, le regard morne, plongée dans son gin fizz la clope au bec, le style destroy détérioré. L’attirail auparavant recherché n’était plus que haillons après des jours sans avoir l’occasion de se doucher. Ses sous-vêtements provocants se distinguaient sous son corset charbon et sa jupe de cuir décidemment trop courte. Une pute. Une femme avant tout. Chagrinée de son métier du soir de fille de joie. Une fumée vaporeuse et grisâtre s’échappait de ses lèvres peu apparentes de nuits pas assez chastes. Elle s’en allait, quittait le pub et rejoignait son lieu d’habitude. Strasbourg-Saint-Denis. La névrosité parvint au moyen d’un métro, vide, des heures creuses où le danger de l’agression rôde. Elle ne craignait rien, les violences, il en était de sa nature d’en être régulièrement victime. Elle descendit, arriva sur la rue principale, assise sur une barrière, elle fumait encore. Seule ? Pas vraiment. Une dizaine de jeunes filles l’accompagnaient sur cette chaussée déserte de passants, une heure d’attente, les clients se firent rares ce jour-ci. Heureusement, un quinquagénaire avec la bedone qui pointait sous une chemise trop juste et des lunettes rondes l’approcha. Il l’invita à venir comme il aurait convié une autre du même type de la manière dont on rappelle son chien. Elle n’avait pas à lui faire confiance ou à en avoir peur, c’était un homme de passage, non un habitué, elle ne recroiserait plus sa route puisqu’à chaque nouvelle aventure il changeait de partenaire. Il appréciait varier les compagnies afin de satisfaire ses requêtes de mâle déprimé qui ne plaisait à aucune. C’était le genre à ne pas connaître l’amour, il avait ce besoin de la prostituée qui devenait intense avec son âge de plus en plus avancé. Celle-ci patientait lors des embouteillages, il cherchait un hôtel. Un taudis pour prendre son pied. Les sentiments de la femme qu’il « violait », il s’en moquait puisqu’à la fin de la relation sexuelle, il lui donnait un salaire en conséquence de ce qu’elle lui aurait fait. Elle, regardait par la vitre, le maquillage coulant connaissant déjà la suite et dégoutée de ce corps bien trop touché qu’elle n’en pouvait plus de porter. Elle ignorait ses désirs. Le client lui en ferait part une fois avachi sur un lit trop mou, alors elle devrait l’exciter, lui donner envie. La péripatéticienne accomplissait une à une de ses tâches telle une machine. On lui glisserait un billet dans son push up bien garni. Puis, elle s’en irait. L’homme s’endormirait ici, se réveillerait seul dans des draps imprégnés de sperme et de différentes ADN. Le travailleur prendrait une douche, le sourire aux lèvres, joyeux d’avoir pu vider son sexe dans celui d’une autre. Il rejoindrait son entreprise et continuerait à vivre comme-ci de rien était. Il niait le fond du problème. Il cherchait au moyen de relations d’une nuit rémunérées l’affection qui lui manquait. La pute n’était pas là pour donner de l’amour mais pour procurer du plaisir aux insatisfaits. Quant à cette charmante créature, elle reprendrait son rôle d’ouvrière mal payée dans une boite pleine à craquer qui n’hésiterait pas à la licencier à la moindre faute professionnelle. Nous vivons dans un monde particulier où nous n’avions pas le droit à l’erreur. Si les problèmes économiques n’accroissaient pas et si nous étions tous riches, il n’y aurait pas de mendiants ou de filles vendant leurs corps pour une poignée de monnaie. Malheureusement, l’univers est imparfait.
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